Dimanche 30 novembre 2025
1er dimanche de l’Avent – Année A
Homélie du Père Emmanuel Schwab
1ère lecture : Isaïe 2,1-5
Psaume : 121 (122),1-2, 3-4ab,4cd-5,6-7,8-9
2ème lecture : Romains 13,11-14a
Évangile : Matthieu 24,37-44
L’exercice spirituel que l’Église nous appelle à vivre durant le temps de l’Avent, c’est l’exercice de la vigilance, de la veille. « Veillez donc », dit le Seigneur. En nous appuyant sur la première venue du Verbe fait chair à Bethléem, il y a quelque 2000 ans, nous ravivons notre attente de sa venue dans la gloire. Cette vigilance, cette attention à cet événement à venir dont nous ignorons et le jour et l’heure, doit nous rendre attentifs à repérer les signes de la troisième venue du Seigneur, une venue “intermédiaire” : entre sa venue à Bethléem et sa venue dans la gloire à la fin des temps, le Seigneur ne cesse de venir vers nous, le Seigneur ne cesse de se rendre présent à nos vies. Bien sûr, dans les sacrements où il y a comme une objectivité de la présence et de l’action de Jésus, mais aussi dans bien des événements de notre vie. Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus est pour nous un bon guide pour nous apprendre à voir comment le Seigneur agit, car lorsque nous fréquentons ses écrits, nous remarquons que très souvent, Thérèse, là où nous ne verrions que notre propre action, déchiffre l’action du Seigneur dans sa vie. En fréquentant Thérèse, nous apprenons à notre tour à repérer que le Seigneur agit, vient à nous de diverses manières.
Le temps de l’Avent est donc un temps de veille, de vigilance : être attentif à ce que fait le Seigneur, être attentif à la présence du Seigneur. Et pour cela, nous avons besoin de dégager du temps pour lire les Saintes Écritures… j’allais dire choisissez ce que vous voulez. Nous entrons dans une nouvelle année liturgique : nous allons cette année lire l’évangile de saint Matthieu. Pourquoi ne pas commencer en le lisant de manière suivie pendant ce temps de l’Avent ? Nous nourrir de l’Écriture Sainte pour que l’Esprit-Saint puisse nous montrer comment ce que Jésus a fait, il continue de le faire dans nos vies. Et puis dégager du temps pour la prière, la prière silencieuse, ce temps où je me rends à la disposition du Seigneur pour qu’il fasse en moi ce qu’il veut. Ce ne sont pas des moments où il s’agit de ressentir quoi que ce soit : il s’agit d’offrir ce temps de silence au Seigneur pour qu’il agisse, comme il le veut. Dans le brouhaha de notre vie, dans le brouhaha de notre monde, il est important de créer ces moments de pause, ces moments de silence où nous retrouvons le Seigneur, non pas par la sensation, mais par la foi : Tu es là Seigneur, tu nous l’as promis.
« Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps »… Et nous pouvons repenser à ce que Thérèse raconte de son enfance, lorsqu’elle évoque cet épisode où à l’école de l’abbaye, elle répond à une sœur qui lui demande ce qu’elle fait quand elle n’a rien à faire. Thérèse lui dit qu’elle va derrière son lit, que là, dans le silence, elle pense. Et la religieuse lui dit :
– Mais à quoi pensez vous ?
Thérèse qui a quelque chose comme 9 ans lui dit :
– Je pense au bon Dieu, à la vie… à l’éternité, enfin je pense !…
Et ensuite elle dit :
– Je comprends maintenant que déjà je faisais oraison. (Ms A Folio 33, v°)
Penser à la vie, au bon Dieu, à l’éternité. Attendre cette venue du Christ en gloire comme nous attendons des amis bien-aimés qui viennent nous rendre visite. Nous savons bien comment nous nous comportons : nous rangeons un peu chez nous et puis nous préparons un bon repas. Et quand tout est prêt, nous sommes là, le cœur vigilant, pour guetter le bruit d’une voiture qui arrive, le bruit d’une porte qui claque, pour nous précipiter pour les accueillir, parce que l’amour que nous avons pour eux, l’amour d’amitié nous pousse à nous préoccuper d’eux d’abord. C’est ainsi qu’il nous faut attendre la venue du Seigneur en gloire, guetter sa venue, guetter les signes de sa présence, déjà annonciatrice de sa venue en gloire… que ce soit demain, que ce soit dans 3 millions d’années, peu importe. Il s’agit de garder notre cœur qui veille. Et Thérèse, quand elle parle du cœur qui veille, n’en parle en fait presque “que” à propos de Jésus. À Noël 1887, ce Noël ou Thérèse avait décidé qu’elle entrerait au Carmel — mais il lui faudra encore attendre trois mois —, pour la consoler, Céline lui a fabriqué un petit bateau que l’on peut voir aux Buissonnets. Thérèse raconte :
J’avais trouvé dans ma chambre, au milieu d’un charmant bassin, un petit navire qui portait le petit Jésus dormant avec une petite balle auprès de Lui, sur la voile blanche Céline avait écrit ces mots : « Je dors mais mon cœur veille » et sur le vaisseau ce seul mot : « Abandon ! » (Ms A Folio 68, r°)
Je dors, mais mon cœur veille : c’est une parole tirée du livre du Cantique des Cantiques. Bien souvent, dans les commentaires de ce livre, cette parole est attribuée à la fiancée qui attend son fiancé. Et là, Thérèse ainsi que Céline et sans doute aussi Pauline, l’applique à Jésus. C’est Jésus qui est celui qui dort et dont le cœur veille. Thérèse fait l’expérience dans sa prière que Jésus n’intervient pas — elle voit ses interventions à d’autres moments de sa vie — mais dans l’oraison, elle dit : Jésus dort. Mais en même temps, elle a cette idée que Jésus dort, mais son cœur veille, si bien que la veille de Thérèse qui attend cette venue du Christ dans la gloire, qui attend le jour où elle va enfin le rencontrer face à face, cette veille de Thérèse est comme une imitation de la veille de Jésus. Il faudrait qu’il en soit aussi de même pour nous : que notre attitude de veille, que cet exercice spirituel que nous allons faire dans le temps de l’Avent, soit une manière d’imiter le Seigneur qui dort, mais dont le cœur veille. À plusieurs reprises, elle le désigne ainsi — dans une lettre elle écrit :
Je sais bien que son cœur veille toujours et que dans la patrie des Cieux Il daignera ouvrir ses yeux divins… (LT 160 du 3 avril 1894, à sœur Marie-Aloysia Vallée).
À un autre endroit dans le manuscrit A elle parle de Celui dont le cœur veille pendant son sommeil (Ms A Folio 67, v°). Et dans une des récréations pieuses, la fuite en Égypte, elle fait parler la sainte Vierge qui, à demi voix, dit :
Joseph, que Dieu bénisse votre sommeil, reposez en paix sous le regard de Celui dont le cœur veille toujours. (La Fuite en Égypte, RP6, Folio 2r°)
Raviver notre vie de prière.
Raviver notre veille, notre attente de la venue du Christ en gloire au milieu des événements de notre monde dont nous ne savons pas bien ce qu’il sera demain.
Notre stabilité, c’est de veiller dans l’attente de la venue du Christ.
Et pour cela, rejeter les activités des ténèbres, comme dit Paul et nous revêtir des armes de lumière. Et les attitudes qu’il décrit sont toutes simples : « Conduisons-nous honnêtement, comme on le fait en plein jour, sans orgies ni beuveries, sans luxure ni débauches, sans rivalité ni jalousie, mais revêtez-vous du Seigneur Jésus Christ ». C’est-à-dire cherchez à imiter le Seigneur dans votre comportement avec vos frères. Cherchez à aimer comme Jésus aime, à être doux et patient comme Jésus est doux et patient, à être serviable comme Jésus qui se fait le serviteur et ainsi de suite…
Rendons grâce à Dieu qui vient nous chercher, à travers l’année liturgique, pour nous exercer à raviver notre vie chrétienne, c’est-à-dire notre vie d’enfant de Dieu, pour que nous progressions sur le chemin de la sainteté.
Amen
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