Dimanche 27 avril 2025

2ème dimanche de Pâques – Année C

Dimanche de la Divine Miséricorde

Homélie du Père Emmanuel Schwab

1ère lecture : Actes 5, 12-16

Psaume : 117 (118), 2-4, 22-24, 25-27a

2ème lecture : Apocalypse 1, 9-11a.12-13.17-19

Évangile : Jean 20, 19-31

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Nous avons entendu, dans la première lecture tirée du livre des Actes des Apôtres, ce fait que rapporte Luc : on allait jusqu’à mettre les malades sur les places en les mettant sur des civières et des brancards afin que, à son passage, l’ombre de Pierre couvrît l’un d’eux.

Je souligne ceci parce qu’on voit que, dès l’époque apostolique, l’apôtre Pierre tient une place particulière, non seulement dans la communauté chrétienne, mais aussi dans le peuple. On ne nous dit pas que ces malades qu’on vient mettre là sont tous des croyants en Jésus Christ, mais ils ont repéré quelque chose. Et entendre cet Évangile au moment où nous célébrons les obsèques du pape défunt, le pape François, est comme un clin d’œil de la Providence pour nous dire l’importance du ministère de Pierre dans l’Église, entrainant ainsi l’importance de notre prière pour les cardinaux qui vont avoir la charge d’élire le 267ème successeur de l’apôtre.

Ce deuxième dimanche de Pâques a été voulu comme le dimanche de la miséricorde par le saint pape Jean-Paul II. Qu’est-ce que la miséricorde ? Et qu’est-ce que les lectures d’aujourd’hui nous disent de la miséricorde et en particulier cet évangile ? La première chose qui nous est dite, c’est que la miséricorde est déjà un pardon, mais elle est plus que cela. Les apôtres sont réunis, il n’y a sûrement pas que les apôtres… d’abord parce qu’il y a la Vierge Marie avec eux, et puis il y en a d’autres comme Cléophas qui est là le dimanche soir. Ces apôtres et ces disciples ont conscience qu’ils ont laissé tomber le Seigneur, ils ont conscience que Pierre a renié par 3 fois, ils ont conscience que Judas a trahi — et c’est même cela qui a causé la mort du Seigneur — et que Judas est allé se pendre. Ils ont toutes les raisons de désespérer et d’eux-mêmes, et du salut, et de l’avenir. Et Jésus vient. Jésus, c’est celui qu’ils ont abandonné, celui qu’ils ont renié, celui qu’ils ont trahi, celui en qui ils n’ont pas cru. Et quelle est la première parole qu’il leur délivre ? « La paix soit avec vous ». Cette parole, nous l’avons entendu répéter 3 fois : 2 fois le premier dimanche et une fois le deuxième dimanche. La paix soit avec vous. Et Jésus, c’est bien celui qu’ils ont crucifié. De manière étrange, Thomas veut vérifier qu’il est bien le Crucifié, et Jésus livre ses plaies aux doigts et aux mains de Thomas. Comme si Jésus était livré jusqu’à la fin des temps pour que l’homme croit : « Ne sois pas incroyant, mais croyant… — Mon Seigneur et mon Dieu », s’écrie Thomas.

Ce qui nous est dit là de la miséricorde, c’est que celui qui vient consoler les disciples et les apôtres d’avoir abandonné le Seigneur, de l’avoir renié, de l’avoir trahi, de ne pas avoir cru en lui, celui qui vient les consoler de leurs péchés, c’est celui-là qu’ils ont abandonné, qu’ils ont renié, qu’ils ont laissé. Celui qui peut nous consoler de nos péchés, c’est Dieu que nous offensons par nos péchés. Et la miséricorde, c’est non seulement un pardon, mais une consolation : la consolation du Christ qui non seulement prend sur lui nos péchés, mais nous donne la paix. Cela nous enseigne pour nous-mêmes dans nos relations les uns avec les autres. De manière presque paradoxale et surprenante, celui qui peut me consoler de l’avoir blessé, c’est celui que j’ai blessé. Celui qui peut consoler la personne qui m’a blessé, c’est moi, non seulement à travers mon pardon, mais à travers un amour renouvelé, rendu, plus fort que l’offense. C’est cela que Dieu fait pour nous.

Cette miséricorde, nous enseigne sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, est tellement abondante dans le cœur de Dieu, que Dieu n’a d’autre désir que de la déverser sur l’humanité. Et Thérèse se désole que si peu demandent la miséricorde de Dieu.

Au fond, nous aimerions être “quittes”. Nous aimerions avoir une vie bien réglée qui fait que Dieu n’aurait rien à nous pardonner et nous serions “quittes”. Mais au fond, ce que Dieu veut, c’est nous donner un amour surabondant qui nous nourrisse, qui nous fasse grandir et qui nous apprenne petit à petit à imiter Dieu comme des enfants bien-aimés, pour reprendre la formule de Paul dans la lettre aux Éphésiens, au début du chapitre 5, au verset 1 : « Cherchez à imiter Dieu, puisque vous êtes ses enfants bien-aimés ».

Nous serons, frères et sœurs, éternellement en dette vis-à-vis de Dieu et c’est une joie ! C’est une joie ! Qu’avons-nous alors à faire ? Comme m’ont dit des amis un jour qui venaient de me faire un beau cadeau, je leur dis : mais je ne sais pas comment vous remercier ; et lui m’a répondu : tu dis merci, c’est tout.

Comment rendre grâce à Dieu ? Mais dites-lui merci. Disons-lui merci. Comment ? D’abord ici, dans la célébration de l’Eucharistie. Le mot “Eucharisti3e veut dire “merci” en grec. L’Eucharistie, c’est l’action de grâce de Jésus à son Père.

Et la grâce qui nous est faite, c’est d’entrer dans le merci de Jésus. Nous venons ici apprendre à dire merci. Comment est-ce que Jésus dit merci à son Père, comment vit-il ce merci ? En se donnant à lui. Comment vit-il ce merci ? En se donnant à lui totalement. En faisant la volonté du Père : « Ma nourriture, c’est de faire la volonté de mon Père » (Jn 4,34). « Et moi, je fais toujours ce qui lui plaît », dit Jésus (Jn 8,29).

Et nous venons ici apprendre à vivre ce merci en faisant ce qui plaît au Seigneur, pauvrement, simplement, dans notre petitesse, comme nous le pouvons, mais avec bon cœur et sans jamais renoncer. Dire notre merci à Dieu en cherchant à nous aimer les uns les autres, à nous pardonner, à nous servir les uns les autres, comme le Seigneur s’est fait notre serviteur… nous l’avons célébré particu-lièrement le Jeudi Saint. C’est cela la vie chrétienne : être ébloui par la miséricorde de Dieu et dire merci en vivant à notre tour de cette miséricorde.

Tout l’évangile, nous dit saint Jean, est écrit pour que nous croyions. Prenons du temps toujours pour lire, relire, méditer l’Évangile et pour y contempler le Christ Jésus, le Seigneur, celui qui est le premier et le dernier, le vivant, celui qui était mort et qui est désormais vivant pour les siècles des siècles, celui qui détient les clés de la mort et du séjour des morts.

Oui, rendons grâce à Dieu, qui nous a tant aimés qu’il a donné pour chacun de nous son Fils unique, afin qu’en mettant notre foi en lui, nous ayons ici et maintenant la vie éternelle.

Amen

Père Emmanuel Schwab, recteur du Sanctuaire